Avignon, mai 1727: Bannière, novice chez les jésuites, passionné de théâtre, aperçoit l’actrice Olympe de Clèves par la fenêtre de son couvent. C’est le coup de foudre. Le jeune homme s’enfuit. Il se rend au théâtre. Et se retrouve aussitôt sur les planches, à remplacer Champmeslé, acteur pieux honteux d’être comédien, qui vole ses habits à Bannière et part se faire jésuite à sa place! Le jeune homme est contraint de fuir. Mais il n’est pas seul dans sa fuite. Bientôt Olympe se joint à lui… Entre Lyon et Paris, dans la proximité du roi Louis XV, de salles de jeu en théâtre de province, et jusqu’à Charrenton, l’aventure des deux jeunes gens se développe pleine de passions, de jalousies et d’ambitions. Mais la vie est-elle bien différente du théâtre? Et quel sort peut bien réserver le destin à des jeunes gens qui ont voulu connaître dans leur vie des passions aussi intenses qu’au théâtre?Ce roman de Dumas, où le théâtre joue un très grand rôle, n’est pas à proprement parler un roman sur le théâtre, mais un roman sur le théâtre et sur la vie. C’est l’ambition des Romantiques qui est décrite ici: avoir voulu confondre le théâtre et la vie. Le théâtre est aussi une efficace grille de lecture pour appréhender le monde. Le monde comme théâtre, et le théâtre comme roman: faire se rencontrer le roman et le théâtre, voilà l’ambition de Dumas dans ce livre injustement méconnu.C’est d’abord l’histoire de gens de théâtre qui vivent des aventures romanesques: les amours d’Olympe et de Bannières sont pleines de péripéties.
C’est aussi un roman sur le théâtre du pouvoir, le jeu de illusions qui fait la scène politique, où chacun, à la manière de comédiens, essaye de tirer les ficelles du pouvoir, du seul véritable pouvoir: les désirs d’un roi, Louis XV, débauché qui justement s’y connaît en plaisirs.
Ce sont enfin deux magnifiques portraits: Olympe, le plus beau portrait de femme, à mon avis, de la période, à côté de la Consuelo de Georges Sand; et Bannière, incarnation de la liberté romantique en bute contre les répressions de la raison et du calcul. En faisant de ces personnages des figures tragiques, Dumas a su montrer comment le théâtre, et plus précisément le drame romantique pouvait, lorsqu’il est invité dans le roman, offrir une manière de révolte contre tous les pouvoirs, une clef d’intelligibilité du monde aussi, des vrais enjeux de la vie, en opposant aux forces qui ne songent qu’à enfermer (le couvent, l’armée, la monarchie, etc.), la vitalité paradoxale, naïve, pathétique, mais sublime du héros romantique.